Je suis un être qui appartient à son temps et qui emprunte plusieurs formes de création pour s’exprimer, en fonction des moyens qui le provoquent." Mohamed Kacimi
C’est la déchirure qui incite à la création...
Mohamed Kacimi n’est plus, ses oeuvres, son souvenir sont éternels comme ces pyramides de Gizeh, témoins immuables du génie humain, traces sempiternelles d’un passage évanescent, éternité dans l’infinitude du Créateur...
J’ai pensé en me remémorant le souvenir de Kacimi, me limiter à recueillir quelques uns de ces innombrables témoignages écrits en son hommage, mais je me suis ravisée, quels mots emprunter aux autres pour exprimer ce qui gît au fin fond de mon âme ?
J’ai le souvenir d’un Kacimi vivant, exaltant la vie, souriant et bienveillant, nous attendant devant l’Atelier en face de la plage d’Assilah...
L’Atelier, Assilah ...l’été 2003, le dernier de son existence, le premier de mon engouement, de ma passion pour l’Art.
Qui fut Kacimi? Un homme parmi les hommes sans aucun doute, une ombre fugace et le reflet d’une âme éphémère. Je ne parlerai pas de l’artiste ni de l’écrivain, ni même de cet homme militant pour les droits de l’Homme et l’épanouissement de la société marocaine. Je ne citerai que ce que j’ai ressenti face à cet homme frêle, discret, cordial et sympathique, qui sans hésiter nous livra une partie de son âme, quelques brins de sensibilité...
Sur la forme je ne m’attarderai guère. Sur le fond, le mien, j’ai moult images à éclairer...
Kacimi disait que le monde n’est nullement celui qu’on perçoit, mais c’est celui qu’on porte en soi, et son monde à lui était un paradis d’évasion, d’enchantement et de soulèvement. Mon monde ressemblerait davantage à celui de Kacimi si j’avais eu l’occasion de connaître la lutte, la joie de souffrir et la souffrance d’être heureuse...
J’ai le souvenir d’une discussion sur la disparité entre l’impression qu’on donne et ce qu’on est réellement, j’avais espéré qu’on me parle davantage du fond, mais hélas on s’est borné à ne voir que la forme, comme qui dirait que c'est au milieu que se trouve le mérite in medio stat virtus. Pour Kacimi, et pour ceux qui ont adopté ce don de voir au-delà des reflets, la forme est tout simplement l’ersatz du fond et l’image n’est que figuration de « l’infigurable ».
«Creuse Driss, la lumière est au fond » disait Driss Chraibi dans son « Passé simple », et si l’on creusait ensemble ? Dans la mémoire de Kacimi, dans ces peintures désormais « orphelines », dans ces écritures,mots engagés...
Aujourd’hui encore, mon coeur pleure cet homme. De regret ? Non, tout simplement de nostalgie.
Les Mohamed Kacimi, ne meurent jamais tant que les traces sont là...
Les plaies se cicatrisent, le fond se confond avec la forme, et la vie continue...
PS: J'avais écrit ce texte pour Horizons citoyens en Avril 2004, quelques mois après la disparition de Mohamed Kacimi le 27 Octobre 2003. Je le publie aujorud'hui sur mon blog...pour le souvenir.