Je me suis réveillée en sursaut, saisie par une sensation étouffante d’être prise au piège. Un labyrinthe fait de mailles d’histoire et peuplé d’araignées centenaires. Le cercle vicieux du temps ne semble vouloir se défaire que par les mains d’un Buendia, mais lequel ?
Un jour José Arcadio Buendia quitta, avec sa compagne Ursula, la terre natale. S’enfuir encore et toujours, quitter un sol pour un marécage, abattre des forêts et défaire les chaînes des montagnes pour arriver au bon port, le nouveau village de Macondo. Du péché originel, le meurtre de Prudencio, qui ouvrit la boite de pandore jusqu’à la naissance maléfique de l’enfant à queue de cochon, malédiction de la consanguinité et fruit de l’inceste consommé, la chronique de la famille Buendia fût prédite et relatée avec ses heures joyeuses et ses nuits ombrageuses par Melquiades, l’ancêtre des gitans. Une histoire
qui dura cent ans et qui tint dans un manuscrit en sanscrit douloureusement déchiffré par l’ultime Buendia au crépuscule de la destruction finale. Une imagination débordante et un sens de réalisme, apparenté à la vérité de l’âme humaine, aussi accru et rare que peut l’être la conscience de l’existence.
Ce livre est un passage obligé pour savoir que la vie n’est en partie que désir contradictoire de perdition et en une autre une perpétuelle quête de solitude. C’est une véritable invitation à vaguer dans les mythes de l’être humain, dans ses espérances et ses folies les plus périlleuses.
La chronique de Macondo, village don du ciel apparu en songe, de sa naissance à sa mort, de sa Genèse à son Apocalypse, est à l’image de la vie humaine : enfance, maturité, vieillesse et mort, mais aussi est à l’image de toutes les civilisations humaines, à l’effigie de l’Histoire elle-même.
Cent ans de solitude est un livre de la création, le reste est littérature...